Votre argent souffre-t-il du syndrôme canadien ?

Evitez cette erreur qui menace vos investissements

Bonjour à tous,

En cette période de canicule, j'espère que vous faites bien attention à vous et vos proches.

L'été étant propice à la réflexion, j'ai profité des vacances pour prendre du recul sur nos stratégies d'investissement.

Aujourd'hui, dans ce volet "spécial vacances", on va parler du Canada, pays que je connais bien.


🍁 Ô Canada ! Carnet de voyage d'un ex-banquier inquiet

Je reviens à l'instant de vacances, où j'ai sillonné l'Est canadien pendant deux semaines. Ontario, Québec, parcs nationaux, rives du Saint-Laurent. Des paysages à couper le souffle, des retrouvailles avec d'anciens amis et collègues, mais aussi des observations troublantes.

Ce pays ne m'est pas inconnu. J'y ai vécu 5 ans, pour travailler dans deux start-ups. Ce voyage a donc provoqué chez moi un mélange d'émotions : émerveillement, nostalgie et une certaine inquiétude grandissante.

Voici mes observations, dont certaines contiennent des leçons pour votre argent.

1️⃣ "1 € = 1,62 $ canadien" - Le choc du tableau de change

C'est la première chose qui m'a frappé en descendant de l'avion. Ce panneau lumineux à l'aéroport Pearson.

Il y a trois ans, quand j'ai quitté Toronto, c'était 1 € pour 1,31 $ canadien. Une dégringolade de 20% en si peu de temps. Un ami, banquier chez TD Bank, m'a confirmé autour d'un café : "On n'a pas vu ça depuis 2008. Même nos clients institutionnels paniquent."

Au-delà de la simple variation monétaire, ce chiffre raconte l'histoire d'un pays qui m'est cher... mais qui vacille. Nous y reviendrons plus bas.

2️⃣ Civilité et tolérance - L'actif immatériel du Canada

Ici, pas de grognements dans la rue ou dans le métro, pas de bousculades aux portes des magasins. Les "sorry" fusent même quand c'est vous qui marchez sur le pied de quelqu'un.

Dans le streetcar (tramways) de Queen Street, j'ai vu une scène impensable à Paris : un punk à crête aide spontanément une vieille dame avec monter dans le bus. Personne ne filme, personne ne commente. C'est normal.

Les communautés cohabitent. La diversité est partout, assumée, revendiquée. Dans mon ancien quartier de Cabbagetown, un restaurant éthiopien côtoie un pub irlandais, l'église anglicane est en face d’une association LGBT.

L’environnement parisien, me semble, par contraste, plus tendu et fragmenté. Cette cohésion sociale canadienne, c'est un actif. Les pays qui maintiennent cette harmonie résistent mieux aux crises économiques.

Leçon d'investissement : Les pays avec une forte cohésion sociale résistent mieux aux crises. C'est pourquoi je surpondère toujours les obligations d'État des pays nordiques dans les allocations défensives.

3️⃣ Nature canadienne - La carte postale qui cache la forêt

Des points de vue à couper le souffle, c'est vrai. Le Fjord-de-Saguenay, les Mille-Îles, les chutes Montmorency près de Québec. Chaque détour de route ressemble à une carte postale.

Mais en discutant avec un garde forestier au Lac Saint-Jean, j'ai appris que les revenus du tourisme nature ont chuté de 30% post-COVID. "Les Américains ne viennent plus autant, et les Chinois ont disparu", m'a-t-il dit en regardant le lac presque désert.

Cette nature magnifique, c'est 20% des réserves mondiales d'eau douce. Un trésor dans un monde qui a soif. Pourtant, le Canada peine à le valoriser économiquement.

4️⃣ Toronto, mon ancienne maison - La gentrification à l’arrêt

J'ai vécu 5 ans à Toronto, dans le quartier de Cabbagetown. Un magnifique quartier de maisons victoriennes du début du siècle, avec ses grandes rues bordées d'érables centenaires.

Quand j'y habitais, entre 2017 et 2022, c'était l'effervescence. Chaque mois, un nouveau café branché, une galerie d'art, un restaurant fusion. Les maisons délabrées se transformaient en bijoux patrimoniaux. Moi-même, j’avais acheté ma maison en 2018 pour 980.000$ pour la revendre 4 ans plus tard 1,45 million.

Cette fois-ci, le choc. Carlton Street a des vitrines placardées. Le café où j'avais mes habitudes a fermé. Mon ancienne épicerie fine est devenue un Dollarama (l'équivalent de nos magasins à 1€).

Plus inquiétant : en me promenant le soir sur Jarvis Street, j'ai compté plus de tentes de sans-abris que de terrasses ouvertes. Un ami agent immobilier m'a confirmé : "Les prix stagnent depuis 2 ans, mais avec l'inflation à 3,4%, c'est une baisse déguisée. Certains vendeurs attendent depuis 18 mois."

La gentrification espérée semble avoir pris un sacré coup de frein.

Ici, à Cabbagetown (centre de Toronto)

5️⃣ Québec, forteresse francophone

A Montréal, tout autre son de cloche. La ville vibre, les festivals d'été battent leur plein. Sur le Plateau, l'ambiance rappelle le Marais parisien des années 90 - créatif, bohème, authentique. Les prix de l’immobilier ont, eux, continué à grimper continument ces dernières années.

Mais c'est surtout l'omniprésence du français qui frappe. Même au centre-ville de Montréal, tout se passe en français. Les serveurs de la rue Sainte-Catherine ne « switchent » plus automatiquement en anglais quand ils détectent un accent anglophone.

Un ami québécois entrepreneur m'explique : "La loi 96, c'est du sérieux. Mon entreprise a dû traduire tous ses documents internes. Même les réunions Zoom avec Toronto doivent avoir une option française."

Cette protection farouche du français agace les canadiens « anglos ». "Shopify envisage de déménager des équipes vers Toronto", m'a confié une source. Mais les Québécois s'en fichent pas mal. Leur marché culturel protégé de 8,5 millions de francophones leur suffit.

6️⃣ "Vous autres Français..." - La remarque qui pique

C'est arrivé plusieurs fois pendant le voyage. À Toronto, dans un bar du « village ». À Montréal, lors d'un dîner avec des amis. Puis, lors, d’un concert en plein air.

"Les Français donnent souvent l’impression de tout savoir mieux que tout le monde."

La première fois, j'ai ri jaune. La troisième, j'ai compris. Un Québécois m'a dit cash : "J’ai détesté Paris. On m’a tellement mal reçu…"

Touché. Nous avons nos propres angles morts.

Le Canada, une économie fragilisée

L'économie canadienne fait actuellement face à un double choc :

  • Le rouleau compresseur Trump

  • Les effets de cycle des matières premières.

Ici, devant une agence emblématique de la BMO Banque de Montréal (à Montréal)

Trump impose 35% au Canada, l'Europe s'en sort avec 15%

Pendant mes vacances, j'ai lu des dizaines de commentaires outrés sur les réseaux. "Von der Leyen nous vend aux Américains !" "L'Europe se couche !"

Vraiment ? Mettez-vous deux minutes à la place d'un entrepreneur canadien :

  • Europe : 15% de droits de douane, avec des exemptions majeures (dont l’aéronautique)

  • Royaume-Uni : 14,8% de droits de douane (soit 10% négociés lors de l’accord + 4,8% en vigueur avant l’accord)

  • Canada : 35% sur les produits hors accord USMCA. Menace permanente de renégociation de l'accord en 2026… 

    • Certes, 85% des produits exportés vers les Etats-Unis sont exonérés de droit de douane, car couvert par le traité USMCA. Cependant, de nombreuses industries stratégiques pour le Canada (et le Québec) vont pâtir de ces droits très élevés. C’est le cas du secteur de l’acier, de l’aluminium mais aussi du bois et des produits forestiers.

Un ami canadien avec qui j’ai étudié à HEC Paris, qui exporte des essences de bois rare, m'a montré ses calculs : "Avec 35% de taxes, je perds de l'argent sur chaque tonne vendue aux US. Mon business model de 15 ans est foutu."

L'usine d'aluminium de Rio Tinto près de Chicoutimi, que j'ai vue lors de mon séjour (voir newsletter précédente), emploie 2.000 personnes directement. Avec les sous-traitants, c'est 10.000 familles qui vivent de cette usine. Si les droits de douane s'appliquent à l'aluminium, c'est une région entière qui s'effondre.

Finalement, cette mise en perspective montre qu’Ursula von der Leyen n'a peut-être pas si mal négocié...

D’autant plus que, comme le souligne Olivier Lendrevie dans son excellente newsletter MoneySmart, « [l’accord commercial entre la France et les Etats-Unis] reste soumis à la ratification du Conseil européen, composé des chefs d’États des pays de l’Union, à la majorité qualifiée (soit a minima 15 États sur 27, représentant 65 % de la population de l’U.E). »

C’est la preuve ultime que les attaques ad nominem contre Ursula von der Leyen ont été à côté de la plaque…

L'erreur stratégique du Canada : 75% des œufs dans le panier américain

Les Etats-Unis représentent 75% des exportations canadiennes !

Soit 338 milliards $ (en 2024). C’est 25% du PIB canadien.

Imaginez que 25% (ou même 75%) de votre patrimoine soit investi dans une seule action. C'est exactement ce qu'a fait le Canada avec son économie.

Cette dépendance extrême devient aujourd'hui un piège mortel. Chaque tweet de Trump fait trembler la Bourse de Toronto. Chaque menace tarifaire provoque une réunion de crise à Ottawa.

Aussi, le TSX (l'indice boursier canadien) a ainsi sous-performé le S&P 500 de 47% sur 5 ans. Cette forte contre-performance est grandement liée à la dépendance américaine.

L'économie canadienne repose sur trois piliers, tous fragiles :

1. Les exportations vers les USA - Menacées par les droits de douane Trump

2. Les ressources naturelles - Le pétrole albertain se vend 14,73 US$ de moins que le pétrole texan. Le bois d'œuvre est massacré par les droits de douane. Même l'eau, leur or bleu, ne trouve pas preneur.

3. L'immobilier - À Toronto et Vancouver, les prix sont tellement hauts qu'une génération entière est exclue de la propriété. La dette moyenne des ménages atteint des sommets vertigineux.

Résultat ? Le dollar canadien s'effondre. Les investisseurs fuient. La confiance s'effrite.

Pendant ce temps, l'Europe diversifie. Nos exportations vers les USA ? 20% du total. Soit une fraction de notre PIB. Notre exposition au risque Trump ? Limitée. Nos débouchés ? Multiples.

Ce que cette histoire nous enseigne sur nos investissements

J'observe la même erreur chez beaucoup d'épargnants français.

Combien d'entre vous ont :

  • 80% de leur patrimoine dans l'immobilier parisien ?

  • 75% de votre PEA sur un seul ETF World?

  • Leurs économies dans l'entreprise familiale ?

Si c’est le cas, vous êtes un "Canadien" qui s’ignore 😉

La diversification n'est pas un concept d'école de commerce. C'est une assurance-vie.

Ainsi, regardez votre patrimoine avec honnêteté :

  • Quelle part représente votre actif principal ?

  • Combien de sources de revenus différentes avez-vous ?

  • Si votre principale position perdait 30%, pourriez-vous dormir tranquille ?

Si vous transpirez en lisant ces questions, vous avez un problème de concentration.

Contactez-moi

Que votre "surpondération" soit l'immobilier parisien, le CAC 40, ou l'entreprise familiale, la leçon est la même : diversifiez ou subissez.

Répondez-moi directement pour me partager votre propre "syndrome canadien". Vos retours m'intéressent toujours, et j'y réponds personnellement.

Et si vous souhaitez un regard extérieur sur votre allocation patrimoniale, contactez-moi. Les 10 premières demandes auront droit à une analyse gratuite.

À très vite,


Pierre Maynial
Monsieur Capital
Conseil en Investissement Financier (ORIAS : 25006327)


PS : La semaine prochaine, je vous parlerai de ma rencontre avec un gestionnaire de fonds canadien qui a prédit la chute du dollar... et comment il a protégé ses clients. Ses techniques sont applicables à vos portefeuilles.

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