Correction boursière : pourquoi faut-il rester zen ?

Découvrez pourquoi la correction actuelle n’a rien d’un nouveau krach de 2008

Bonjour à tous,


Ici Pierre Maynial, alias Monsieur Capital.

Aujourd’hui, j’ai deux sujets qui méritent votre attention :

  • mon analyse sur le « changement de narratif » des marchés depuis 4 semaines

  •  la surprenante saga des actions Hermès de Nicolas Puech (Où sont passés les 12 Mds € ?)

Le « changement de narratif » des marchés

Nette, méthodique : la régularité de la baisse intrigue - Evolution du S&P 500 entre le 13/2 et le 13/3

Depuis quatre semaines, les indices boursiers américains reculent avec une constance de métronome : Le S&P a perdu environ -2,5 % par semaine, soit -10% sur la période.

Vous êtes nombreux à vous en inquiéter. Avant d’expliquer pourquoi je pense qu’il n’y a pas lieu de céder à la panique, revenons sur les mois précédents.

1. Les marchés ont été longs à intégrer les mauvaises nouvelles

Je suis personnellement convaincu de l’efficience des marchés financiers. A chaque instant, les marchés déterminent toujours le « juste prix » des actifs. Il est d’ailleurs difficile de se croire plus malin et d’anticiper des mouvements de hausse ou de baisse à court terme mieux que le reste des investisseurs. C’est le meilleur moyen en général de perdre sa chemise.

Pourtant, il existe des épisodes d’irrationalité et de surréaction. C’est ce que l’on a vu en 2020, lorsque le cours d’un baril de pétrole avait atteint -30 $, ou encore lors de la bulle des valeurs internet en 1999–2000...

Mais parfois, il arrive au contraire que le marché mette beaucoup de temps à digérer un flot de mauvaises nouvelles.

C’est à mon avis ce qui s’est produit ces 4 derniers mois.

Depuis novembre 2024, on voit l’inflation remonter aux États-Unis et la Fed freiner ses baisses de taux. Le moral des consommateurs américains s’obscurcit et Trump brandit la menace d’une guerre commerciale sans précédent...

Pourtant, de novembre à janvier, les indices mondiaux ne se sont pas effondrés. Il a fallu attendre mi-février pour qu’une baisse marquée s’installe (-10 % sur le S&P 500). Les actions européennes, qui avaient pris du retard, ont même gagné du terrain pendant cette période (Euro Stoxx 50 : +10%).

Ça me rappelle 2007-2008, lorsque la crise des subprime avait été ignorée trop longtemps avant que la réalité d’un risque bancaire systémique ne frappe de plein fouet.

2. L’ancien narratif “IA + dérégulation” était très puissant

Si les marchés ont tardé à réagir, c’est parce que le narratif dominant restait très optimiste jusqu’à début 2025. On peut résumer le sentiment dominant du marché ainsi :

  • Gains de productivité liés à l’IA : Les investisseurs étaient persuadés que les gains de productivité de l’Intelligence Artificielle allaient doper l’économie américaine et mondiale dans un avenir proche (Nvidia a largement profité de cette euphorie).

  • Déréglementation et baisse d’impôts promises par Trump : Le marché espérait un environnement encore plus “pro-business” aux États-Unis, avec un allègement de la pression fiscale et un assouplissement des ratios prudentiels des banques. Autant d’ingrédients propices à prolonger la dynamique d’investissement et soutenir la croissance mondiale

  • Ambiance post-Covid : Les grandes valeurs tech (7 Magnifiques) profitaient déjà depuis longtemps d’une popularité extrême ; beaucoup y voyaient la garantie d’une hausse quasiment éternelle.

Sauf que, depuis mi-février, les menaces d’une guerre commerciale se sont concrétisées, la dynamique de l’IA a été relativisée par quelques indicateurs de ralentissement macro… Bref, la tonalité a changé.

3. Faut-il vraiment s’inquiéter ?

Trump à Wall Street après son élection, début janvier 2025

À court terme, on assiste à un retournement qui peut faire craindre d’autres soubresauts dans les semaines à venir. Néanmoins, si l’on compare la situation à 2000 (bulle Internet généralisée) ou 2008 (risque bancaire systémique), on n’en est absolument pas là.

  • Les multiples de valorisation du S&P 500 (PER médian à 21×) restent alignés avec leur moyenne sur 15 ans, hormis certaines technos (Nvidia à ~36×, Apple à ~30x).

  • Les fondamentaux de l’économie américaine demeurent solides : croissance solide (prévision 2025 : 2,7%), emploi élevé (taux de chômage à ~ 4,1%), innovation soutenue, etc. L’imprévisibilité de Trump pourrait s’avérer plus tactique que réellement destructrice pour l’économie US.

  • En Europe, en revanche, la compétitivité des entreprises est un souci plus structurel. Les finances publiques en France également. Mais on ne voit pas le spectre d’un effondrement imminent.

En clair, on peut s’attendre à de la volatilité, mais un krach massif de type 2008 ne semble pas d’actualité. Si toutefois les marchés baissaient significativement, cela pourrait même représenter une occasion d’entrée parfaite pour les investisseurs qui disposent le liquidités.

4. Conséquences pour vos investissements

  • Dans le contexte actuel, il peut être raisonnable d’avoir une exposition actions modérée (et de ne pas négliger les actifs à risque modéré comme les obligations à maturité courte), sans pour autant paniquer et tout vendre.

  • Compte tenu du fort regain de volatilité, une surréaction du marché n’est pas à exclure (-30% ou plus sur les grands indices), ce qui pourrait présenter une excellente opportunité pour renforcer son exposition actions.

    • Plusieurs facteurs actuels peuvent contribuer à de telles corrections, notamment la prévalence du trading algorithmique, les effets des « stop-loss », particulièrement après 15 ans de croissance soutenue des marchés, ainsi que l'impact des ETF passifs."

La saga des actions Hermès : où sont passés les 12 Mds € ?

Changeons de registre pour terminer : j’ai évoqué récemment sur LinkedIn un épisode à 12 milliards d’euros autour de la perte des actions Hermès par Nicolas Puech, héritier de la célèbre maison.

Je voulais partager cette histoire qui, j’espère, vous intéressera autant que moi.

Nicolas Puech : un descendant en ligne directe de Thierry Hermès

Il y a quelques semaines, je suis tombé sur une histoire à rebondissements passionnante publiée dans la Tribune de Genève : Nicolas Puech, héritier Hermès, affirme avoir perdu l’équivalent de 12 milliards d'euros en actions.

Descendant direct du fondateur, Nicolas Puech possède 5,76 % d’Hermès. Très tôt, il se retrouve en froid avec sa famille qui le juge trop « frivole », au point de refuser d'intégrer la holding familiale. Mais paradoxalement, c’est lui le plus grand actionnaire individuel. Un annuaire d’Hermès, datant de 2012, lui attribue le titre cocasse de « forestier ».

La saga commence au début des années 2000, lorsque Bernard Arnault lance un raid sur Hermès. Entre 2001 et 2014, LVMH grignote en secret plus de 23% du capital de son rival. Des soupçons surgissent : Nicolas, qui, au cœur de la bataille, refuse d’apporter ses titres à la holding familiale, aurait-il cédé ses actions à l’ennemi ? Pendant des années, contraint par Hermès et sa famille de prouver l’existence de ses actions, il assure détenir ses 6 millions de titres… jusqu’à ce qu’il change brusquement de discours.

En 2023, l’héritier dépose une plainte à Genève, accusant son gestionnaire de fortune, Eric Freymond, d’avoir « détourné » sa fortune. La justice classe l’affaire sans suite, faute d'éléments tangibles. Nicolas se dit désormais « ruiné ». Mais auparavant, il jurait conserver ses titres...

Autre revirement : il aurait entamé ces dernières années des démarches pour adopter Jadil Butrak, son ex-jardinier, avec qui il vit reclus depuis COVID. Celui-ci deviendrait donc l'unique hériter de Nicolas Puech. Auparavant, il s'était organisé pour qu'à sa succession, ses titres retournent à la famille.

Entre la méfiance d’Hermès, la rancœur familiale et le rôle parfois ambigu de l’entourage (ex-jardinier, anciens domestiques qu'il appelle ses « enfants »), l’histoire n'est pas sans évoquer la célèbre affaire Bettencourt et le rôle ambigu de François-Marie Banier.

Il semblerait impossible, en 2025, qu’un bloc d’actions aussi gigantesque (plusieurs milliards) s’évapore totalement ... Pourtant, la saga Puech nous prouve qu’avec le secret bancaire, le pouvoir des trusts autres montages financiers complexes, tout est moins transparent qu’il n’y paraît.

Toutes les pistes sont désormais ouvertes :
➡️ Les actions sont-elles cachées dans un trust à l’étranger ?
➡️ Ont-elles été vendues à LVMH ?
➡️ Nicolas Puech a-t-il été dupé ?
➡️ A-t-il dilapidé son patrimoine par rancœur vis-à-vis des siens ?

Quelle piste privilégiez-vous ?

Ce cas illustre la façon dont la gouvernance familiale et les intérêts individuels peuvent parfois s’entrechoquer, même au sein de groupes réputés très stables.

Ce n’est pas directement lié à la volatilité actuelle, mais cette histoire souligne qu’en Bourse, la gouvernance d’une entreprise est tout aussi déterminante que les tendances macroéconomiques.

En conclusion, nous traversons un moment où le marché corrige un optimisme un peu trop prolongé. Je perçois ce regain de volatilité plus comme un ajustement tardif que comme un signe de bulle généralisée. Restez attentifs, gardez un œil sur votre horizon d’investissement : si vous avez besoin de vos capitaux à brève échéance, ne sous-estimez pas la volatilité. Mais pas de panique, il y aura peut-être même d’excellentes opportunités dans les mois qui viennent. A suivre.

N’hésitez pas à me contacter si vous avez des commentaires ou si vous souhaitez revoir la répartition de votre portefeuille.


Bon week-end et à très bientôt,

Pierre Maynial
Alias Monsieur Capital

Les informations disponibles dans ce message sont à but éducatif et ne constituent pas des conseils d'investissements personnalisés au sens du Code Monétaire et Financier.